4.6.1
Le lendemain matin, en arrivant chez L’Oréal, une jeune jolie fille blonde, dynamique et souriante, m’attendait. Elle se présenta comme Lucie, stagiaire au service des ressources humaines, responsable de l’accueil de tous les stagiaires. Elle m’emmena directement au bureau du cinquième étage. La vue depuis les fenêtres de son bureau donnait sur la colline de Montmartre et la blanche basilique du Sacré-Cœur. Je m’exclamai : « L’Oréal est vraiment une entreprise romantique, même la vue depuis votre bureau est magnifique. » Lucie jeta un regard par-dessus son épaule, puis répondit avec un doux sourire : « J’aime beaucoup cet endroit. Une fois mon stage terminé, cela me manquera certainement. »
Elle me remit une carte d’accès pour les employés ainsi qu’une carte magnétique pour la cantine. Après m’avoir demandé de remplir quelques formulaires, elle m’accompagna pour découvrir la cantine et l’infirmerie. Nous traversâmes le petit couloir reliant les bâtiments B et A. Au coin de ce couloir étaient exposés de nombreux trophées remportés par L’Oréal au fil des ans, notamment ceux du « Meilleur employeur pour les stagiaires en France ».
La cantine se trouvait juste derrière l’entrée principale du bâtiment A, en demi-sous-sol. À côté de la grande salle principale, il y avait une mezzanine ouverte, aménagée en café, entourée de fauteuils. Dans un coin, un distributeur de tickets permettait d’acheter des tickets à 30 centimes d’euro grâce à la carte magnétique de la cantine. Tous les croissants, pains au chocolat, pains aux raisins et cafés coûtaient un ticket, sauf le jus d’orange fraîchement pressé, qui en demandait deux. De l’autre côté de la salle principale, une boutique exposait des produits L’Oréal.
« Nous, les stagiaires, pouvons acheter des produits à moitié prix sur l’intranet de L’Oréal, avec un plafond de 600 euros pour toute la durée du stage, ce qui permet d’acquérir pour 1200 euros de produits. C’est mon avantage préféré en tant que stagiaire, » expliqua Lucie en souriant.
En sortant de l’infirmerie, elle me ramena au bureau de Madame Pham, au troisième étage du bâtiment B, et me rappela : « Dans une heure, tous les nouveaux devront assister à une formation sur la sécurité. Je viendrai te chercher à ce moment-là. »
4.6.2
Madame Thúy Lan Phạm me jaugea de haut en bas, laissant brièvement transparaître une expression de désapprobation. Elle sortit une blouse blanche encore sous emballage et me la tendit pour que je l’enfile. Sur la poitrine de la blouse étaient brodés les mots « L’Oréal Recherche & Innovation». Elle me donna également un stylo et un carnet de notes de laboratoire : « Allez, on va faire un tour pour te présenter aux gens de l’étage. Tu es le tout premier stagiaire de notre équipe. Les autres équipes ont toutes des bureaux spécialement réservés aux stagiaires, mais toi, tu devras emprunter le bureau de quelqu’un qui est en vacances. C’est pourquoi il est important que tu fasses bonne impression et que tu noues de bonnes relations avec tout le monde.
Les stagiaires chinois ont tendance à éviter les interactions sociales et à se concentrer uniquement sur leurs travaux. Il y avait un stagiaire chinois avant toi qui est resté six mois sans connaître un seul collègue. Tu dois comprendre que ces collègues, ce sont tes futurs contacts professionnels. Et comme tu es tombé sur moi en tant que tuteur, ne compte pas te cacher. Je vais te pousser à rencontrer un maximum de personnes ! »
Elle me conduisit dans le premier laboratoire à droite du couloir et applaudit en disant : « Attention tout le monde, je vous présente mon tout premier stagiaire : Dengjun. » Je souris et répondis : « Appelez-moi plutôt Alex. Mes amis m’appellent ainsi, c’est plus facile à prononcer pour les Français. » Thúy Lan ajouta : « J’aime bien ce prénom. »
Dans le laboratoire, il n’y avait que des femmes, à l’exception d’un homme chauve et mince. Il versait un seau de shampooing fraîchement mélangé dans un grand entonnoir et chronométrait le temps d’écoulement pour estimer rapidement la viscosité du produit. Quand Thúy Lan applaudit, il perdit sa concentration et oublia d’arrêter son chronomètre, ce qui l’obligea à tout recommencer. Hausant les épaules, il secoua doucement la tête avec un air d’auto-dérision et déclara : Pauvre de nous ! Si tu étais venu faire ton stage six mois plus tard, on serait déjà installés dans notre nouveau bâtiment R&D. Là-bas, chacun aurait son propre cabinet individuel et un grand bureau. Mais regarde-nous ici : on est tous entassés, bureaux et paillasses mélangés, et à chaque pas, on risque de tout renverser. Honnêtement, nous, les anciens, on s’en accommode, mais accueillir un stagiaire dans un bazar pareil… Franchement, ça fait un peu honte à L’Oréal ! »
Je répondis avec enthousiasme : « Mais ce bâtiment historique est directement relié au siège mondial de L’Oréal. Je me sens chanceux d’être ici ! Si j’étais dans le bâtiment extérieur, ce serait bien moins intéressant. Ici, c’est le paradis romantique, le centre du monde ! »
Thúy Lan, se tournant vers l’homme, dit : « Tu as entendu ça, Fabien ? Alors arrête de te plaindre. Tu travailles au centre du monde, que demander de plus ? »
Tout en refaisant son expérience, Fabien, l’air faussement pensif, murmura : « Le centre du monde ? Ce ne serait pas plutôt Disneyland Paris ? »
4.6.3
Thúy Lan ouvrit une porte latérale à côté du laboratoire, nous faisant entrer dans une pièce remplie d’étagères. Ces dernières étaient chargées de flacons et de bouteilles en plastique de toutes les couleurs, sur lesquels étaient inscrits des textes dans les langues du monde entier. « Voici le dépôt de notre ‘laboratoire concurrentiel’. Nous sommes une petite équipe, mais notre réserve est la plus grande. On y trouve des shampooings et des après-shampooings vendus sur les marchés du monde entier. »
Je m’approchai d’une étagère ornée d’un drapeau chinois et y jetai un coup d’œil. Soudain, je tirai un flacon de shampooing du milieu et m’exclamai, surpris : « Ce shampooing, je l’utilisais quand j’étais petit ! Depuis que je suis entré au collège, je ne l’ai plus jamais vu sur le marché. C’est un souvenir de mon enfance, et je ne m’attendais pas à le retrouver ici ! »
Thúy Lan, fière, déclara avec un sourire : « C’est grâce à mes collègues de L’Oréal à l’étranger que j’ai pu l’obtenir. Ils ont fait du bon travail, n’est-ce pas ? »
Elle entra ensuite dans un deuxième laboratoire, presque identique au premier dans son aménagement. « Celui d’avant était pour les produits de nettoyage, ici c’est pour les soins capillaires. » Une femme grande, mince, au visage préoccupé, portant une blouse blanche et arborant une coupe courte et soignée, parlait au téléphone en anglais avec un accent français très prononcé : « Payement? I don’t know wat you are talking about. ‘Ere is a laboratoire. I cannot hespond to your question!»
Thúy Lan lui demanda : « Valérie, c’est quoi cet appel bizarre ? » Valérie, visiblement irritée, raccrocha brusquement et marmonna avec colère : « Le standard abuse. Un distributeur chinois qui vend nos shampooings n’a pas reçu les commissions promises par son agent. Alors, il a trouvé un traducteur anglais et appelé le siège, et le standard a transféré l’appel ici. »
Thúy Lan, réprimant un rire, répondit : « Nos shampooings font un malheur sur le marché chinois. Ce n’est pas plus mal que notre équipe de recherche et logistique ait un aperçu de ce qui se passe sur le terrain ! Allez, je te présente Alex, mon stagiaire chinois. La prochaine fois, laisse-le s’occuper de ce genre d’appels. »
Valérie, d’un ton morne, répondit : « Bienvenue. »
Thúy Lan lui lança : « Allons, Valérie, un peu d’enthousiasme ! Alex vient juste de dire à Fabien que notre laboratoire est le centre du monde. Tu devrais te sentir chanceuse et heureuse de travailler ici ! »
Valérie, de mauvaise humeur, répliqua sèchement: « Le centre du monde, hein ? Attendons de voir s’il dit encore ça dans six mois, quand il n’aura toujours pas réussi à créer la formule qu’il espère. »
Voyant que Valérie s’enfonçait dans sa mauvaise humeur, sa collègue assise à côté d’elle tenta de changer de sujet : « Thúy Lan, tu devrais emmener Alex voir Nadia. Elle a récemment amélioré sa formule après l’échec de son gel coiffant aux herbes et cherche maintenant des cheveux asiatiques bien raides pour tester le résultat. »
Thúy Lan rit : « Merci pour le tuyau ! C’est justement là que nous allons. » Puis elle me conduisit dans un troisième laboratoire.
4.6.4
Je demandai à voix basse à Thúy Lan : « Que voulait dire Valérie en parlant de six mois sans créer de formule ? »
Thúy Lan répondit : « Pour les stagiaires de notre étage, la plupart des missions consistent à développer une nouvelle formule de shampooing ou d’après-shampooing avec des propriétés innovantes dans un délai de six mois. Mais créer une nouvelle formule, même avec une préparation parfaite, dépend un peu de l’humeur de Dieu lorsqu’il lance les dés. Ne t’inquiète pas, ta mission est d’étudier les formules existantes et d’en dégager des schémas récurrents. Peu importe comment tu t’y prends, tu obtiendras forcément des résultats. »
Tout en discutant, nous arrivâmes au laboratoire suivant. Celui-ci était nettement plus ordonné que les deux précédents. Il y avait moins de béchers, de cylindres gradués, d’agitateurs chauffants, de pH-mètres et autres équipements. À leur place, divers instruments électroniques occupaient les paillasses. Contrairement aux laboratoires précédents bondés de monde, celui-ci n’abritait que deux personnes.
Près de l’entrée, à une grande table de travail, une femme de grande taille, à la peau brune et aux traits métissés euro-africains, était assise. Ses longs cheveux bruns bouclés comme des nouilles lui descendaient jusqu’à la taille. Sur son bureau, une rangée de pots en verre contenait des feuilles, des tiges, des racines de plantes et des minéraux variés. De l’autre côté de la pièce, une jeune fille chinoise, au visage harmonieux et à la chevelure noire et brillante comme une cascade, était assise à une table contre le mur, concentrée sur son écran pour modifier son rapport.
Thúy Lan sourit : « Regarde, Alex, il y a aussi une autre stagiaire chinoise ici. Tu ne te sentiras pas seul ! »
Je souris largement et m’adressai à la jeune femme en chinois : « Enchanté, je m’appelle Alex et je viens de l’École de chimie de Bordeaux. »
Elle répondit avec élégance en chinois : « Bienvenue chez L’Oréal. Je m’appelle Lu Xiaonan. »
Thúy Lan demanda à Lu Xiaonan : « Pourquoi n’es-tu pas encore partie à la séminaire mi-stage? »
Lu Xiaonan expliqua : « Le groupe d’analyse physique est en réunion d’équipe. J’attends que Véronique ait fini pour y aller avec elle. »
Thúy Lan se tourna alors vers moi pour me présenter la femme métisse : « Voici Nadia, notre experte en botanique. Aujourd’hui, les consommateurs se plaignent de plus en plus des cosmétiques issus de l’industrie chimique. Ils recherchent des produits naturels et biologiques. Nadia travaille à exploiter le pouvoir curatif des plantes pour créer des soins capillaires à base d’ingrédients naturels. »
Surpris et ravi, je dis : « Ma mère est médecin en médecine traditionnelle chinoise. Elle travaille quotidiennement avec des plantes médicinales. J’ai d’ailleurs remarqué dans notre réserve que certains shampooings chinois utilisent une herbe appelée Polygonum multiflorum. Cette plante est réputée pour ses bienfaits sur les cheveux. Peut-être pourrions-nous aussi l’intégrer dans nos produits L’Oréal. »
Sans hésitation, Thúy Lan refusa : « Nos collègues chinois m’ont déjà soumis cette idée, mais je l’ai rejetée. Je n’ai trouvé aucune publication scientifique expliquant clairement le mécanisme d’action de Polygonum multiflorum sur les cheveux. »
Je répondis : « Les propriétés de Polygonum multiflorum s’expliquent par la théorie chinoise du yin-yang et des cinq éléments. Avec la médecine occidentale moderne, il est difficile de les rationaliser. Pourtant, cette plante a été testée et prouvée par des siècles de pratique clinique en Chine. Même sans explication scientifique complète, son efficacité est indéniable. Si nous devions l’expliquer en termes occidentaux, je dirais que Polygonum multiflorum contient des dizaines, voire des centaines d’oligo-éléments essentiels au corps humain. Lorsque nos organes sont déséquilibrés en raison de la fatigue ou d’autres facteurs, ils ne produisent pas suffisamment d’hormones pour nourrir les cheveux, ce qui entraîne leur détérioration. Les oligo-éléments présents dans Polygonum multiflorum aident à rétablir cet équilibre en soutenant la production hormonale, ce qui redonne vitalité au corps. Cependant, la médecine occidentale a tendance à isoler un ou deux composés cibles pour étudier leur effet. Or, dans une plante comme Polygonum multiflorum, il y a des dizaines ou centaines de composés interagissant entre eux pour produire un effet global bénéfique. Cela dépasse les capacités analytiques des méthodes scientifiques actuelles. »
Thúy Lan répondit d’un ton ironique : « Tu peux m’expliquer tout cela, je t’écouterai avec patience. Mais n’oublie pas que nos produits L’Oréal sont vendus dans le monde entier. Si j’ajoute une plante comme Polygonum multiflorum et qu’un organisme de régulation en Europe ou en Amérique du Sud exige de moi un rapport scientifique prouvant son efficacité, que devrais-je faire ? C’est trop risqué. Tous les extraits botaniques que Nadia utilise sont soutenus par des études scientifiques publiées en anglais. »
4.6.5
Tout en parlant, une dizaine de personnes sortirent d’une pièce adjacente au laboratoire, menées par le chaleureux Alain. En me voyant, Alain s’exclama avec joie : « Enfin te voilà ! Nous venons justement de tenir une réunion à ton sujet. Thúy Lan t’a présenté à quelques personnes, je suppose ? »
Thúy Lan répondit : « Aujourd’hui, j’ai commencé par lui faire rencontrer les gens du troisième étage. Pas besoin de tout faire en une seule fois, il faut qu’il digère tout ça petit à petit. Viens, je vais te présenter Frank. Je suis spécialisée en chimie analytique, mais ton stage nécessitera aussi des connaissances en physico-chimie, et Franck et moi allons t’accompagner ensemble. »
À ma grande surprise, ce Frank n’était autre que l’homme à l’air sérieux, aux cheveux courts, que j’avais rencontré au rez-de-chaussée lors de mon premier entretien de stage, celui qui avait répondu à mes questions ! En me voyant, Frank me sourit comme un vieil ami, tandis que je restais bouche bée.
Thúy Lan déclara : « Nous trois, il faut qu’on trouve un moment pour tenir une réunion d’équipe. » Frank répondit : « Demain matin, ça te va ? »
Une petite femme blonde s’approcha de Lu Xiaonan ; c’était son tuteur, Véronique. Lu Xiaonan se tourna vers moi et dit en français : « Nous allons au séminaire mi-stage. Beaucoup de stagiaires de L’Oréal seront présents, tu devrais venir avec nous pour rencontrer du monde ! »
Je répondis : « Je dois bientôt assister à la formation sur la sécurité. »
Lu Xiaonan répliqua : « Ça marche, les salles de la formation et de la réunion sont juste en face l’une de l’autre. Rejoins-nous après ta session. »
La formation se déroulait dans une grande salle de conférence de 200 places, mais seules une vingtaine de personnes étaient présentes, dont cinq ou six Chinois. Je m’installai à côté d’eux. Ces stagiaires chinois m’expliquèrent qu’ils travaillaient tous au département marketing et étaient arrivés quelques jours auparavant, mais ne suivaient la formation sécurité qu’aujourd’hui. Ils travaillaient au sixième étage du bâtiment A entièrement dédié au marketing. Chaque étage s’occupait d’un continent différent, et le sixième étage gérait l’Asie. Le dernier étage abritait les bureaux des cadres dirigeants.
Depuis une petite fenêtre de la salle de conférence, on pouvait apercevoir, de l’autre côté, le VIP Café, où un homme grand et mince, chauve, en costume, discutait affaires à une table. Mes voisins chinois chuchotèrent : « Regarde, c’est Jean-Paul Agon, le directeur général de L’Oréal ! Deux semaines avant ton arrivée, il y a eu ici les célébrations du centenaire de L’Oréal. On a vu Agon parcourir tout le bâtiment, en train de poser pour des photos avec tout le monde. »
Par la suite, je croisai souvent ces stagiaires chinois dans le café qui vendait des viennoiseries. Nous, les stagiaires du département R&D, avions un rythme tranquille. Les soirs où nous finissions nos expériences tard, les employés permanents nous pressaient de rentrer chez nous. (Règle de sécurité : tant qu’un stagiaire en R&D est encore au laboratoire, au moins un employé permanent doit rester pour superviser.)
En revanche, ces stagiaires du marketing semblaient constamment débordés, avec des tâches interminables. Une fois, je vis même un jeune stagiaire chinois sortir du café avec un œil maquillé de mascara et d’ombre à paupières. Ils m’expliquèrent plus tard qu’ils préparaient une publicité pour un mascara. Les filles chinoises de l’équipe n’avaient pas les yeux correspondant au style souhaité, alors ils avaient maquillé de force le garçon pour simuler un œil féminin et pris des photos.
4.6.6
Le formateur énonça plusieurs règles de sécurité : en cas de déclenchement de l’alarme incendie, peu importe l’importance de ce que vous êtes en train de faire, il faut immédiatement quitter le bâtiment par les escaliers et se rassembler dans le parc près de la mairie de Clichy. Il est interdit de discuter de son travail dans le métro après les heures de bureau, car certains espions industriels se tiennent dans la ligne 13, profitant des conversations des collègues pour obtenir des informations confidentielles. Tous les papiers usagés doivent être détruits avec un broyeur et placés dans des poubelles spéciales. L’Oréal prend ensuite en charge le traitement de ces déchets déchiquetés. Cela fait suite à des incidents passés où des espions industriels fouillaient les poubelles derrière L’Oréal pour collecter des bandes de papier. (Nous, les quelques stagiaires chinois, nous pincions le nez en riant doucement.)
Le formateur partagea ensuite une anecdote : un jour, une délégation étrangère visitait une usine de L’Oréal. Le responsable de l’usine remarqua qu’un membre de la délégation se penchait systématiquement pour examiner de près les mélanges en cours de fabrication, et que le bas de sa cravate trempait chaque fois dans la pâte du mélange. Il eut alors une idée brillante et déclara : « Selon les coutumes françaises, à la fin d’une visite, on échange toujours sa cravate avec ses hôtes. » Plus tard, ils découvrirent qu’un appareil de détection chimique était caché dans la cravate de cet homme. Cette histoire digne de James Bond m’émerveilla pendant longtemps. En revanche, le broyeur de papier devint pour moi un nouveau jouet amusant. Je trouvais toutes sortes de moyens pour fabriquer des déchets à broyer. Les feuilles de papier utilisées chez L’Oréal étaient du papier recyclé, une initiative écologique, mais à cause de moi, elles finirent en une montagne de gaspillage.